​Devenu sujet de préoccupation d’ordre public, le caractère inéluctable de la réalité des changements climatiques devient également perceptible à l’échelle de la ville ; la formation d’îlots de chaleur constitue en effet un enjeu emblématique des effets locaux du changement climatique pour les systèmes urbains. (Dugeny 2012)
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«Nous sommes désormais entrés dans le “siècle de la ville”. La taille, la forme, la structure et les fonctions des milieux urbains et les trajectoires de leur croissance future sont des éléments critiques de leur transition vers la durabilité. L’urbanisation est une composante majeure du changement global, dans le même temps qu’elle est menacée par lui »
International Conference on Urbanization and Global Environmental Change « Opportunities and Challenges  for Sustainability in an Urbanizing World » 15-17 octobre 2010  (livre, 2011)

Issu de l’apport de chaleurs naturelles et anthropiques dans la ville et ce, bien avant la reconnaissance scientifique du phénomène de changement climatique (Bertrand, 2012), le lien causal entre réchauffement planétaire et manifestations de période d’extrêmes climatiques dans le milieu urbain subsiste ; l’influence de la ville sur son site et son environnement devient indéniable lorsqu’on considère la fréquence et l’intensité de ces périodes de chaleur accablantes. (INSPQ 2009)

Une problématique urbaine
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Les îlots de chaleur, d’abord d’un phénomène d’ordre physique, demeure toutefois tributaires des caractéristiques inhérente du milieu urbain, lié à sa morphologie, ses matériaux conjugué aux éléments de conditions naturelles, géographiques, climatiques et météorologiques. (Dugeny 2012)



Il se dégage ainsi une inadéquation dans l’aménagement des milieux urbains face aux pressions anthropiques, et qui contribuent conséquemment à augmenter la vulnérabilité de ses occupants. Compte tenu de la complexité de la problématique et de son imbrication avec d’autres évolutions socioéconomiques et environnementales, le présent essai s’interroge sur rôle de l’aménagement territorial et de l’urbanisme pour lutter contre l’aggravation des effets néfastes de la compacité de la ville, tout un prônant une ville dense en lien avec les prémisses du développement durable et de la lutte contre l’étalement urbain.



Adaptation, atténuation et transition du milieu urbain

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La ségrégation immanquable entre ville urbanisée et l’environnement naturel sous tend une corrélation avec la fragilisation de la capacité de résilience du milieu urbain face aux perturbations thermiques. À cet effet, nombres de projets de réintroduction de la biomasse en contexte urbains ont été réalisés et une diversité de stratégies de verdissement émerge. À l’image de la préoccupation du climat urbain dans les grandes métropoles, la Ville de Paris s’engage en 2009 dans la réalisation d’un éco-quartier exemplaire dans le 17e arrondissement; le projet Clichy-Batignolles voit le jour (fig.1), combinant une prise en compte des préoccupations sociales et économiques avec un volet environnemental ambitieux en lien avec l’adoption du Plan climat de 2007.

























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Ce dernier sera utilisé à titre référentiel dans le cadre de l’approfondissement des enjeux du climat anthropique urbain, présentant une richesse d’échelles d’interventions en aménagement et en architecture à cet effet. Une série de parallèles seront établie entre les écrits scientifiques sur les changements climatiques, les écrits théoriques sur l’adaptation urbaine et les écrits plus pratiques sur les stratégies d’intégration de mesures concrète.


Participer à la robustesse écologique

L’imbrication d’une trame végétalisée à l’intérieur du tissus urbain influe sur le climat urbain à plusieurs niveaux ; la biomasse modifie la chimie atmosphérique et contribue à la qualité de l’air, il devient élément régulateur du degré hydrométrique de l’air, il agit à titre de bris solaire et évite la surchauffe par le biais de l’instauration d’îlots de fraîcheur.(Dugeny 2011) Le projet Clichy-Batignolles, doté d’un ambitieux parc urbain de 10 hectares, présente une diversité de typologies d’écosystème urbain (fig. 2) ; arbres d’alignement le long des axes viaires, forêts urbaines, aires cultivées et les jardins communautaires, espaces de pelouse et zones humides agissants comme éléments d’atténuation des effets extrêmes du climat.





























Selon le rapport de François Dugeny sur les îlots thermiques,  si la végétalisation de la ville contribue au confort thermique par une climatisation locale des tissus urbain, la mise en place d’un réseau plus complexe de Trame verte et bleu en milieu (TVB) aura davantage un rôle régulateur à long terme et sur des espaces plus vastes.

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L’organisation du parc urbain des Batignolles (fig. 3), avec des prolongements sous forme de liaisons végétalisées, contribue à un maillage de l’ensemble des espaces verts et s’impose comme réseau structurant complexe de biodiversité à l’échelle urbaine, et donc un dispositif de stabilisation climatique robuste.

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Outre les capacités régulatrices de la biomasse, les zones de rétention aquatiques demeurent des mécanismes de rafraîchissement incontournables en milieu dense ; un système de gestion des eaux pluviales aura d’ailleurs été intégré au cœur du parc urbain de Clichy-Batignolles (Fig. 4-5). En plus d’une contribution indéniable à la viabilité d’un écosystème artificiel réintroduit en milieu urbanisé, la perméabilisation des sols par la végétation et la rétention de l’eau favorise l’évapotranspiration  qui sera bénéfique à la stabilisation du climat urbain et donc, qui contribuent à atténuer l’effet des pressions anthropiques assujetti à la ville.










































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Adapter le cadre bâti dense

En termes de politiques d’aménagement urbanistiques, il sera question d’un passage d’une logique spatiale surfacique vers une approche de type réticulaire, selon Chantale Pacteau. En concevant la ville comme un réseau complexe d’interconnexions entre les espaces tampons qui servent d’éléments régulateurs du microclimat urbain, la trame verte revêt un rôle structurant dans le tissu de la ville. N’étant pas systématiquement végétalisée, elle impose plutôt l’idée du rapport entre les pleins et les vides au sein d’un cadre bâti saturé et donc, incorpore la composante de ventilation et de drainage des masses d’air dans la ville.

Pour le projet Clichy-Batignolles, non seulement la création d’un parc urbain monumental fait écho à la présence d’un réseau d’espaces plus vastes à l’échelle de la ville (fig.6), mais l’aménagement de corridors écologiques s’avère particulièrement crucial dans le contexte de la manifestation d’îlot de chaleur urbain en permettant l’apparition de brises qui dissipent la chaleur.
 

Cette notion est traduite par le concept de rugosité (Dugeny 2012), où l’environnement bâti est qualifié en fonction des obstacles qu’il comporte dans le processus d’écoulement d’air. La perméabilité du cadre bâti sera donc tributaire du désenclavement des quartiers et de la connexion des zones tampons entre elles. L’aménagement du secteur Clichy-Batignolles (Fig.6), dans sa vocation initiale de couture physique entre des quartiers, contribue ainsi aux au maillage urbain par la création d’allées qui favorisent ainsi le flux de circulation de l’air et qui s’implantent en continuité avec les axes des tissus viaires environnants.

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Pallier à la vulnérabilité en climat urbain

Si la prémisse du développement durable est à la ville dense et compacte, une concentration des activités dans le cadre bâti s’impose paradoxalement comme une facteur d’exposition supplémentaire aux manifestations de vagues de chaleur par phénomène d’effervescence anthropique.

L’approche de développement d’un éco-quartier sur en zone urbaine nécessite donc une compréhension des composantes contextuelles et morphologique du milieu d’implantation; les îlots de chaleur, caractérisés par la différence de température existante entre les secteurs centraux et périphériques (Bertrand, 2012), demeurent susceptibles de s’intensifier au-gré des activités humaines diverses comme le transport, l’habitation ou le chauffage.



Dans le cadre d’un développement urbain dense, une approche préventive de la problématique est plutôt arborée en neutralisant les facteurs de vulnérabilité. Ainsi, considérant que la notion de chaleur ressentie et de confort thermique des occupants soit davantage lié à la sensibilité aux fluctuations qu’à la température absolue (Dugeny 2011), le système de régulation climatique de la trame urbaine verte doit également être conjuguée aux dispositifs bioclimatiques à l’échelle architecturale pour assurer la stabilité thermique du milieu. Pour le projet Clichy-Batignolles, la modulation du cadre bâti a été développée en tenant  compte des ambiances thermiques liées à la morphologie des formes urbaines qu’elle génère (fig7), en évitant une configuration des rues dite ‘canyon’ (Dugeny 2012), où la chaleur demeure prisonnière et devient synonyme d’un haut niveau de concentration de la pollution.





























Ainsi, l’objectif de conception au niveau de l’échelle bâtie demeure une synthèse globale de l’ensemble des facteurs qui affectent directement ou indirectement le confort thermique. Il implique la prise en compte de la régulation thermique par les revêtements présents sur l’ensemble des surfaces horizontales et verticales en fonction de l’albédo, autant en terme d’aménagement de l’espace public et des réseaux viaires que dans la sélection des matériaux de la composition architecturale (fig. 8)

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Une problématique évolutive

La manifestation d’îlots de chaleur urbain se fait ainsi ambassadeur la problématique multidisciplinaire extrêmement vaste et complexe des bouleversements de notre climat. Dans la perspective où le cadre de cette même adaptation demeure soumise à la nature et l’ampleur des perturbations environnementales,  la réponse en aménagement urbanistique sera portée à s’affiner face à une réalité qui déborde largement des bornes de son champs d’expertise immédiat. Comme l’exprime ces professionnels et chercheurs de l’aménagement:

« Sans frontière, invisible et en partie imprévisible, le changement climatique anthropique acte également l’impossible distinction entre sciences et politiques, le politique étant littéralement « aveugle » sans l’appui des sciences pour fournir des données de caractérisation et de mesure du problème, donc en situation d’incapacité à définir seul une stratégie d’action. »

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« Les trames vertes urbaines et l’adaptation au changement climatique : perspectives pour l’aménagement du territoire » François Bertrand et Guillaume Simonet​

Puisque la problématique urbaine est issue d’une préoccupation récente dans le dossier de l’adaptation aux changements climatiques, les projets réalisés dans cette optique se précisent graduellement et prennent en compte les dernières avancées scientifiques comme base d’implantation de mesures d’atténuation de phénomènes urbains néfastes, dont la formation des îlots de chaleur. Le projet Clichy-Batignolles aura ainsi fortement intégré les recommandations du Plan climat de 2007 en adressant le problème de la vulnérabilité des occupants comme une composante intégré aux prémisses de développement.